Focus sur les principales mesures de la réforme sur la santé au travail

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Suite à l’adoption de la loi « santé au travail » du 2 août 2021, ayant pour objet de renforcer la prévention en santé au travail, des décrets étaient en attente de parution afin de permettre la mise en application des mesures les plus emblématiques au 31 mars 2022. C’est désormais chose faite, avec la publication de trois décrets en date du 16 et 18 mars 2022 (décrets n°2022-372 et n°2022-376 du 16 mars 2022, et décret n° 2022-395 du 18 mars 2022).

Le présent article, qui n’a pas vocation à traiter de façon exhaustive le contenu de cette nouvelle réforme, vise à indiquer les principales évolutions à retenir en termes de santé au travail.

Ainsi, de nouvelles règles sont instaurées concernant le document unique d’évaluation des risques professionnels (i). Aussi, la règlementation relative aux visites médicales évolue (ii), et de nouveaux dispositifs sont créés pour les salariés en arrêt de travail et ceux déclarés inaptes (iii).

I – De nouvelles règles pour le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUER) sont établies

Pour rappel, chaque entreprise, quel que soit son effectif, est tenue d’évaluer les risques professionnels dont les résultats doivent être retranscrits au sein d’un document unique d’évaluation des risques professionnels (DUER).

La loi du 2 août 2021, complétée par le décret n°2022-935 du 18 mars 2022, est venue renforcer le cadre législatif de cette obligation en précisant certaines règles concernant l’évaluation des risques, la mise à jour du DUER, son dépôt, sa transmission, sa conservation et à sa mise à disposition :

  • Participants à l’évaluation des risques : doivent dorénavant contribuer à l’évaluation des risques professionnels dans l’entreprise :
    • le CSE et sa commission santé/sécurité s’ils existent ;
    • les salariés compétents en matière de santé et sécurité au travail;
    • le service de prévention et de santé au travail.

NB : nouveauté : le CSE devra être consulté sur le DUER et sur ses mises à jour

  • Résultats de l’évaluation des risques : le contenu du programme annuel de prévention des risques professionnels, devant être établi à l’issue des résultats de l’évaluation, est aujourd’hui renforcé puisqu’il doit (article L.4121-3-1 du Code du travail) :
    • fixer la liste détaillée des mesures devant être prises ;
    • identifier les ressources de l’entreprise pouvant être mobilisées ;
    • comprendre un calendrier de mise en œuvre.

NB : on notera que pour les entreprises de moins de 50 salariés, les résultats de l’évaluation doivent aboutir à l’établissement d’une liste des actions de prévention, qui devra désormais être présentée au CSE.

  • Mise à jour: seules les entreprises d’au moins 11 salariés sont tenues de faire une mise à jour au moins une fois par an.
  • Dépôt: le DUER ainsi que ses mises à jour devront être déposés de façon dématérialisée sur un portail numérique dans des conditions fixées par décret (à paraître) :
    • pour les entreprises d’au moins 150 salariés : à compter du 1er juillet 2023 ;
    • pour les autres entreprises : au plus tard au 1er juillet 2024.
  • Transmission:  jusque-là simplement mis à la disposition au service de prévention et de santé au travail, le DUER doit maintenant obligatoirement lui être transmis.
  • Conservation: il existe à présent une obligation de conservation du DUER et de ses versions antérieures pendant une durée de 40 ans à compter de son élaboration.
  • Mise à disposition: le DUER doit être tenu à disposition des salariés.

II – Les visites médicales sont modifiées

Le suivi médical des salariés évolue à compter du 31 mars 2022 :

  • Visite de reprise : la visite de reprise devra désormais être organisée pour toute absence d’au moins 60 jours (contre 30 jours avant) pour les arrêts de travail consécutifs à une maladie ou un accident d’origine non professionnelle.
  • Visite de pré reprise: elle peut désormais être organisée à l’initiative du médecin du travail, et peut être demandée, par le salarié dont l’arrêt de travail est d’au moins 30 jours d’absence (contre 3 mois auparavant).
  • Visite de mi-carrière : il s’agit d’une nouvelle visite médicale qui doit être réalisée à une échéance déterminée par accord de branche ou, à défaut, durant l’année civile du 45ème anniversaire du travailleur. Elle peut aussi être anticipée de 2 ans, en l’organisant conjointement avec une autre visite médicale.
  • Visite « post exposition »: cette visite s’adressait initialement aux salariés bénéficiant d’un suivi médical renforcé du fait de leur exposition à certains risques professionnels particuliers (exposition à l’amiante, au plomb, aux agents cancérogènes, …), lorsqu’ils partaient à la retraite. Cette visite doit désormais, en outre, être réalisée dès lors que le salarié cesse son exposition à ce risque particulier pour sa santé.

III – De nouveaux dispositifs pour les salariés en arrêt de travail, et ceux déclarés inaptes, sont créés

Dans un but de lutte contre la désinsertion professionnelle des salariés en arrêt de travail ou reconnus inaptes, plusieurs dispositifs sont mis en place.

  • Le rendez-vous de liaison : pour les salariés en arrêt de travail d’au moins 30 jours, ce rendez-vous avec l’employeur peut être organisé. Il permet de rappeler au salarié ses droits relatifs à son arrêt de travail longue durée (actions de prévention, examen de pré-reprise, mesures d’aménagement du poste de travail).
  • La convention de rééducation professionnelle en entreprise (CRPE) : initialement réservé aux seules personnes ayant un handicap, la loi du 2 août 2021 vient encadrer et élargir ce dispositif, dont le but est de permettre à certains salariés de se réaccoutumer à leur profession, ou de changer de métier. La CRPE s’applique dans les conditions suivantes :
    • Bénéficiaires : travailleurs déclarés inaptes ou avec un risque de l’être.
    • Mise en place : conclusion d’une convention entre l’employeur, le salarié, et la caisse de sécurité sociale, et d’un avenant au contrat de travail.
    • Durée : au maximum 18 mois.
    • Rémunération du salarié : perception d’IJSS pendant toute la durée de la convention, ainsi que d’un complément employeur.
  • L’essai encadré: ce dispositif permet au salarié en arrêt de travail, d’évaluer la compatibilité d’un poste de travail avec son état de santé.  Il s’applique dans les conditions suivantes :
    • Bénéficiaires : salariés en arrêt de travail.
    • Mise en place : à la demande du salarié après une évaluation de la situation par la Carsat, avec l’accord du médecin traitant, du médecin-conseil et du médecin du travail.
    • Durée : 14 jours ouvrables renouvelables dans la limite de 28 jours ouvrables.
    • Rémunération du salarié : perception d’IJSS, et le cas échéant d’un complément employeur selon les mêmes modalités que pendant l’arrêt de travail.